En novembre 2025, Fay Manners, athlète COOKNRUN, et Nicole Berthod ouvrent une nouvelle voie sur la face nord du Jebel Nassrani Sud : Mukatila (405 m / 365 m, 6a, A0).
Cette ligne de 11 longueurs vient élargir les possibilités d’escalade dans l’un des secteurs les plus emblématiques du Wadi Rum, tout en apportant une approche moderne, sécurisée et fidèle à l’esprit du désert jordanien.

Une nouvelle ligne dans un désert où chaque voie compte

Le Wadi Rum est un monde minéral où chaque itinéraire raconte une histoire. Avec Mukatila, Manners et Berthod proposent une voie d’aventure accessible, cohérente et pensée pour durer, un ajout rare sur ce sommet longtemps délaissé.

• 365 m d’escalade

• 11 longueurs

• Cotation max : 6a, A0

• Protections variées : trad, pitons forés, quelques spits

• Face nord : presque entièrement ombragée

L’itinéraire suit les évidences du terrain : fissures, cheminées, corniches sculptées, offrant un mélange équilibré entre terrain d’aventure et sécurité moderne.

Un sommet emblématique… mais longtemps sans voie modérée

La plupart des itinéraires modérés menant aux grands sommets du Wadi Rum ont été empruntés pour la première fois par les Bédouins, souvent il y a plus d’un siècle. Leur logique : suivre les passages les plus faciles pour se déplacer et chasser.

Le Jebel Nassrani Sud, lui, n’en faisait pas partie.
Résultat : aucune voie d’accès modérée, seulement quelques lignes audacieuses ouvertes depuis 1986, rarement répétées.

Mukatila comble enfin ce vide.

Elle apporte :

• un accès raisonnable,

• une ligne logique,

• une protection fiable,

• un esprit d’aventure intact,

• et une descente équipée, réellement rare dans le secteur.

Une voie pensée pour être répétée

Les premières longueurs ont demandé le plus de travail : nettoyage intensif, essais multiples, ajustements pour trouver le passage le plus sûr et intuitif.

Dès la troisième longueur, le rocher dicte le chemin : grandes cheminées, fissures franches, grès sculpté.
Les longueurs en cheminée sont étonnamment agréables : propres, esthétiques et bien protégées grâce aux pitons forés.

La voie se termine au sommet de la tour est du Jebel Nassrani Sud.
De là, les grimpeurs peuvent continuer jusqu’au sommet principal via la voie Precht de 1989, laissée intacte par respect pour ses ouvreurs.

Une fois les 11 relais fixés, l’équipe a également créé une ligne de descente fiable, essentielle pour encourager les futures répétitions.

Un passage marquant : le toit en “flocon”

Parmi les moments forts de l’itinéraire, un toit étonnant attire le regard : un “flocon” de grès, à la fois raide et esthétique.
Spectaculaire en apparence, il s’avère plus facile qu’il n’y paraît et parfaitement sécurisé, l’un de ces passages qui restent en mémoire.

Une cordée féminine pour une voie symbolique

Le nom “Mukatila” signifie guerrière en arabe.
Un clin d’œil évident au caractère de la voie, mais aussi aux grandes lignes environnantes comme Warriors of the Wasteland.

C’est probablement l’une des premières voies entièrement ouvertes par une cordée féminine dans le Wadi Rum, un fait notable dans ce paysage historique.

La présence de Fay Manners, athlète COOKNRUN, donne à cette ouverture une résonance particulière pour notre communauté.
Sa collaboration avec Nicole Berthod a été fluide, complémentaire et déterminante.
Chacune a apporté son expertise : repérage, décisions techniques, nettoyage, forage, installation des protections, portage du matériel… un travail exigeant dans un environnement désertique aussi vertical qu’isolé.

Ce projet, né d’une intuition partagée, s’est transformé en une aventure solide, puis en une voie qu’elles sont fières de laisser aux futurs grimpeurs.

Une aventure complète et accessible dans le désert

Avec son accès simple, son escalade variée, son exposition modérée, son ombre quasi permanente, sa descente équipée et la possibilité de poursuivre jusqu’au sommet… Mukatila a tout pour devenir un classique du Wadi Rum.

Une voie qui propose enfin une aventure modérée mais authentique sur un sommet longtemps réservé aux itinéraires difficiles.

Crédit photo : Florance Goss